Partir s’installer dans un autre pays, pour des raisons professionnelles ou personnelles, entraîne des conséquences juridiques non négligeables au moment de la succession. En effet, celle-ci est alors considérée comme une succession internationale, à partir du moment où un élément d’extranéité est impliqué, tel que des biens situés à l’étranger, la résidence habituelle du défunt à l’étranger et des biens localisés en France.
Les conséquences successorales de la résidence habituelle
Depuis quelques années, la France est soumise, comme tous les États qui sont membres de l’Union européenne, au règlement européen n° 650/2012 du 4 juillet 2012 entré en vigueur le 17 août 2015. Le Royaume-Uni, le Danemark et l’Irlande n’y sont pas soumis, car ces États ne l’ont pas signé.
Ce document a pour objet d’unifier les règles de loi et de compétence qui sont applicables aux successions internationales et qui représentent environ une succession sur dix dans l’Union européenne. Il est également relatif à la création d’un certificat successoral européen. Étant d’application universelle, il autorise la désignation d’une loi qui n’est pas celle d’un État membre de l’UE et donc d’un État qui n’est pas partie à ce règlement.
En résumé, la transmission de biens possédés en France peut se faire selon une loi successorale étrangère :
- Soit si le défunt, lors de son décès, a sa résidence habituelle dans un État étranger et qu’il n’existe pas de mécanisme de renvoi vers la loi successorale française ;
- Soit s’il a choisi de manière explicite, par une disposition testamentaire, de soumettre sa succession à une loi étrangère.
Les conséquences sont importantes, car tous les États n’ont pas les mêmes règles successorales. C’est pourquoi connaître la loi qui sera applicable lors d’une succession internationale présente un intérêt majeur pour les héritiers réservataires, et plus particulièrement en présence d’enfants nés d’une première union.
Toutefois, il ne faut pas négliger le fait qu’il existe à présent le droit de prélèvement compensatoire, instauré par l’article 24 de la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 qui complète l’article 913 du Code civil, en précisant qu’il est possible d’écarter une loi étrangère si les critères suivants sont réunis :
- La succession comporte des biens mobiliers ou immobiliers localisés en France ;
- La loi étrangère qui serait applicable méconnaît le mécanisme de la réserve héréditaire ;
- Le défunt ou au moins l’un de ses enfants est, au moment du décès, ressortissant d’un État membre de l’Union européenne ou y réside habituellement.
Bon à savoir : l’alinéa 3 de l’article 913 du Code civil s’opposant au règlement européen, il n’est pas inenvisageable qu’il soit un jour remis en cause par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE). De plus, il n’est pas interdit de penser qu’il puisse aussi faire l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC).
Comment déterminer la dernière résidence habituelle d’un défunt ?
L’autorité chargée de la succession est tenue d’évaluer, dans son ensemble, les circonstances de la vie du défunt lors des années qui ont précédé son décès et au moment de celui-ci, afin de déterminer quelle est la résidence qui doit être considérée comme habituelle.
Ainsi, pour qu’une résidence soit déclarée comme habituelle, le règlement européen n° 650/2012 du 4 juillet 2012 précise qu’il faut révéler un lien étroit et stable avec l’État concerné. Parmi les critères appropriés pour l’établir, on peut notamment retenir :
- La durée et la régularité de la présence du défunt dans l’État concerné ;
- Les conditions et les motifs de sa présence.
Ces critères peuvent parfois poser des problèmes. C’est pourquoi quelques successions internationales ont fait récemment la première page des médias, ce qui entraîne des jurisprudences de la plus haute juridiction de l’ordre judiciaire français. Pour exemple, l’arrêt de rejet de la Cour de cassation, 1re civile, 21-10.905 & 21-11.041, en date du 12 juillet 2023 qui a été amenée à s’exprimer sur les critères de la notion de « dernière résidence du défunt », en s’appuyant sur le règlement de l’Union européenne n° 650/2012 du 4 juillet 2012.
Le règlement européen entré en vigueur en 2015 a-t-il des répercussions sur la fiscalité des successions internationales ?
Non, ce n’est pas le cas et il est toujours possible de se référer aux conventions fiscales qui sont établies entre la France et les autres États et aux règles du Code général des impôts (CGI), en l’occurrence celles qui sont énoncées dans son article 750. Néanmoins, il est en règle générale préférable de prendre l’avis d’un notaire ou d’un conseiller fiscal.