La loi Lagarde a mis fin à l’obligation de souscrire une assurance emprunteur auprès de la banque qui consent le prêt immobilier. Ainsi, depuis 2010, tout emprunteur peut bénéficier de la délégation d’assurance de prêt et faire jouer la concurrence entre les différents assureurs alternatifs. Il en a la liberté de choix. En 2022, la loi Lemoine est venue parfaire ce dispositif en simplifiant les conditions de résiliation de ce type de contrat. Cependant, malgré la mise en place de ces dispositifs, de nombreux emprunteurs se heurtent encore aujourd’hui à des écueils dès qu’ils refusent le contrat d’assurance proposé par leur bancassureur ou qu’ils souhaitent le résilier. Découvrez les 3 principaux obstacles à connaître.
En quoi consiste l’assurance emprunteur ?
Un contrat d’assurance emprunteur doit comporter des garanties obligatoires, à savoir la prise en charge de tout ou partie des échéances de remboursement en cas de décès, de perte totale et irréversible d’autonomie (PTIA), d’incapacité temporaire partielle (ITP), d’incapacité temporaire totale (ITT) ou d’invalidité permanente partielle (IPP) ou totale (IPT). D’autres garanties comme celle couvrant la perte d’emploi sont facultatives.
Les apports de la loi Lagarde
La loi Lagarde avait pour objectif d’ouvrir le marché de l’assurance emprunteur à la concurrence pour faire baisser les prix. Elle permet ainsi à tout emprunteur de se tourner vers un assureur alternatif, sous réserve que le contrat sélectionné présente des garanties au moins équivalentes à celles prévues dans celui proposé par le bancassureur.
Les apports de la loi Lemoine
La loi Lemoine a simplifié les conditions de résiliation d’un contrat d’assurance emprunteur en élargissant les facilités déjà offertes par :
- la loi Hamon en 2014, possibilité de changer d’assurance pendant la première année de l’engagement ;
- puis la loi Sapin II en 2017, possibilité de changer d’assureur à chaque date anniversaire du contrat au-delà de la première année.
Ainsi, depuis le 1er septembre 2022, tout emprunteur est en droit de résilier son contrat d’assurance, à tout moment et sans aucuns frais, même si celui-ci a été souscrit avant le 1er juin 2022.
La loi Lemoine a également facilité l’accès à cette assurance :
- en supprimant le questionnaire de santé pour les prêts inférieurs à 200 000 € pour une personne seule et à 400 000 € pour un couple, à condition que l’emprunt soit entièrement remboursé avant les 60 ans de l’emprunteur ;
- en réduisant à 5 ans le droit à l’oubli pour les personnes ayant été atteintes d’un cancer, d’une hépatite C ou souffrant de certaines maladies chroniques.
Trois écueils du libre choix d’un assureur alternatif
En juin 2015, une méthode commune d’analyse de l’équivalence du niveau des garanties a été définie, puis toutes les banques ont été tenues de fournir la fiche standardisée d’information (FSI) lorsqu’elles remettent une offre de prêt immobilier à leurs clients. Cette fiche précise dans le détail les garanties qui sont contenues dans l’assurance emprunteur qu’elles proposent. C’est ce document qui servira ensuite pour juger des équivalences, si l’emprunteur décide de rechercher un contrat auprès d’un assureur alternatif.
Enfin, en juin 2017, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), organe de supervision français de la banque et de l’assurance, a émis des recommandations sur le libre choix de l’assurance emprunteur en couverture d’un crédit immobilier.
Or, en 2018, soit huit ans après l’entrée en vigueur de la loi Lagarde, l’ACPR a constaté que de nombreuses pratiques étaient de nature à décourager les emprunteurs qui souhaitent soit souscrire, en première intention, un contrat d’assurance chez un assureur alternatif, soit résilier un contrat chez un bancassureur.
Quels sont les principaux obstacles à la montée en puissance des contrats alternatifs ?
1er obstacle : la crainte de ne pas obtenir le prêt demandé
Selon les données collectées par l’ACPR en 2017, « la part des emprunteurs assurés dans le cadre des contrats proposés par les prêteurs était encore de 87,5 % ». On constate donc que l’entrée en vigueur de la Loi Lagarde n’a pas donné les effets escomptés et que les emprunteurs ont très souvent des réticences à se tourner vers des assureurs alternatifs.
Ce phénomène peut s’expliquer par le fait que les rapports entre un candidat à l’emprunt et une banque sont toujours déséquilibrés. Aussi la personne qui sollicite un prêt craint fréquemment de diminuer ses chances d’obtenir une réponse favorable si elle refuse de souscrire le contrat proposé par le bancassureur. De plus, la facilité d’adhésion offerte par le réseau bancaire pousse beaucoup d’emprunteurs à ne pas faire jouer la concurrence.
2ème obstacle : le comportement des établissements bancaires lors d’une demande de résiliation
Les établissements bancaires ont tendance à répondre tardivement malgré l’obligation légale de respecter le délai de 10 jours. Ils n’hésitent pas à formuler des demandes successives pour réclamer des pièces complémentaires, à refuser des substitutions de garanties en avançant des arguments discutables, à se retrancher derrière des motivations infondées…
3ème obstacle : une hausse de tarif des assureurs alternatifs
Devant le nombre important d’emprunteurs pouvant bénéficier de la suppression du questionnaire de santé, certains assureurs alternatifs ont réagi en appliquant une hausse de leur tarif, allant de 10 à 30 %, dans le but de compenser les risques encourus. Certains d’entre eux ont d’ailleurs choisi de retirer leur offre d’assurance pour les crédits éligibles à la loi Lemoine.
Dans le même temps, les bancassureurs ont réagi aux demandes de résiliation en rognant sur leur marge tout en veillant à conserver des offres très qualitatives.
Autant de raisons qui ont pour résultat de ralentir l’évolution des contrats emprunteurs alternatifs.